Le Viaduc
Construction du viaduc
L'entreprise MAN, de Gustavburg a remporté l'adjudication du viaduc de Failly, le plus important et Union, l'adjudication des autres ouvrages (Vallières, Canner et Villers).
Le tunnel de Failly, 770 m, est creusé dans du calcaire du bas jurassien. La hauteur maximale sur voûte est de 25 m, mais le sol n'est pas homogène, des bandes de roches alternent avec de la marne et de l'argile. Sous l'action de l'eau et du gel, les masses bougent et là aussi le 15 mai 1905 est le plus important : la voûte s'effondre sur 20 m, alors qu'elle repose sur des étais depuis deux mois. Le sol instable en est directement la cause. Son coût de construction s'élève à 1,8 millions de marks. Heureusement, la construction du troisième tunnel de la ligne, celui de Borny, est plus aisé ; il est vrai qu'il n'a que 70 m de long.
Les plans de réalisation des viaducs sont modifiés à plusieurs reprises. Finalement, ils seront tous à superstructures métalliques. Celui de Failly est le plus grand de tout le réseau. Il est long de 574 m et haut de 34 m, son tracé en courbe pose des problèmes aux techniciens en raison des efforts latéraux importants qu'il doit subir. Lors de son franchissement par les trains, il vibrait d'ailleurs de façon impressionnante. Sa construction aura coûté 2,5 millions de marks. Le viaduc de Vallières, en alignement a une longueur de 279 m. Il est le plus élégant et s'inscrit dans un site pittoresque. Les deux autres (Canner : 262 m et Villers :
170 m) se succèdent à faible distance entre Bettelainville et Villers-Bettnach, sans avoir la majesté des deux précédents. Chacun des trois a coûté un million
de marks.
Les entreprises ne se heurtent pas seulement aux problèmes techniques, mais aussi à des difficultés de cohabitation entre ouvriers. Au viaduc de Failly par exemple, dans la nuit du 20 au 21 août 1906, une rixe entre terrassiers italiens et serruriers prussiens fait plusieurs blessés graves. Cinquante à soixante italiens s'en prennent même aux machines et aux locaux de l'entreprise Man (jets de pierre, fils du télégraphe coupés). Le 27 du même mois, deux monteurs hautement qualifiés font leur valise. Le lendemain, c'est un électrotechnicien qui s'en va, après avoir échappé à un coup de fusil, tiré d'un taillis. les entreprises commencent à manquer de personnel qualifié et demandent la protection des forces de l'ordre Pour couronner le tout, en 1905 et 1906, des glissements de terrains emportent des talus et obstruent des tranchées, notamment près de Failly et de Bettelainville.
A Failly, à la sortie du tunnel, le talus glisse sur 300 m et emporte une culée du viaduc. Les dégâts sont estimés à un million de marks. D'importants travaux d'assainissement et d'évacuation des eaux sont alors entrepris. Malgré tout, mais avec une année de retard, la ligne est remise aux autorités, le 25 mars 1908.
Arsène Felten
Inauguration par Henriette
Ce jour là, le 25 mars 1908,tous les invités se réunissent dans le salon réservé à la réception de l'Empereur pour prendre le train inaugural.
Composé de quatre voitures à couloir et remorqué par " Henriette ", une locomotive toute neuve, le convoi s'ébranle à 9 heures pour atteindre Anzeling à 11h50. Dans chaque halte et gare, l'accueil des populations est chaleureux pour ce train qu'ils n'espéraient plus. Un déjeuner est pris à Vigy, où les toasts habituels sont portés, puis, dans la soirée, tout le monde repart sur Metz. L'ouverture au trafic public n'a lieu que le 1er avril 1908, avec un service restreint car la nouvelle gare de Metz n'est pas encore achevée. Au départ de l'ancienne gare, les trains passent par Metz-Sablon, puis empruntent le nouveau raccordement de Metz-Marchandises pour rejoindre la nouvelle ligne. A compter du 18 août, tous les trains partent de la nouvelle gare.
Arsène Felten
Destruction du Viaduc
C'est le 17 novembre 1944 à 13h30 que le viaduc de Failly, sur la ligne Metz-Dilligen a été détruit.
M. René Caboz qui a longuement décrit toutes les péripéties de la libération de Metz dans son ouvrage "La Bataille de la Moselle " confirme la date du 17 novembre 1944.
Depuis le 12 novembre, on procédait à l'évacuation des civils, en faisant appel au volontariat mais, bien sûr, les Messins d'origine se cachaient dans leurs maisons pour ne pas être " évacués ". C'est pourquoi, à partir du 16, huit compagnies de gendarmerie furent chargées de procéder à l'opération. Et M. Caboz termine ainsi son exposé :
" le viaduc de Failly, quoique meurtri par les bombardements aériens, était toujours debout. Il fut pris par le 95ème groupe de reconnaissance de la 90e division U.S., le 17 novembre 1944 ".
M. Robert Lack, de Metz, qui est apparenté à l'ingénieur qui fut chargé des travaux de construction du viaduc, nous donne de nombreux renseignements techniques et photographiques de ce viaduc.
Pendant la dernière guerre, ce viaduc a servi au trafic voyageurs et marchandises ainsi qu'aux besoins militaires de l'armée allemande. Un tunnel de 770 mètres de long prolongeait le viaduc et ce tunnel fut souvent utilisé pour abriter les convois des hauts dignitaires allemands, en visite dans la région ; Hitler y a séjourné. Une installation spéciale de chauffage vapeur y avait été installée pour alimenter les convois en stationnement prolongé.
Dès l'approche des troupes américaines sur les hauteurs de Failly, les autorités militaires allemandes ont donné l'ordre de détruire le viaduc, ce qui fut effectué le 17 novembre 1944 à 13h30. Au moment de l'explosion, un train de munitions allemand stationnait dans le tunnel, mais il n'a pas été détruit par l'explosion, grâce, parait-il, à l'intervention d'un habitant de Failly, aujourd'hui décédé.
Arsène Felten